Interview réalisée par Sabine Didier.
Cet article relate une démarche novatrice, initiée en 2004, par le Pôle Archives de la Région Pays de la Loire , en matière de collecte de témoignages oraux des fonctionnaires avant leur départ en retraite.
Présentation de Séverine MENET, archiviste, Pôle Archives, DSI
De formation littéraire, Séverine MENET a suivi des études d’histoire avant de s’orienter vers le métier d’archiviste et d’obtenir un DESS Histoire et métiers des archives à l’Université d’Angers. En 1998, elle est reçue au concours d’attaché de conservation du patrimoine puis occupe un poste aux Archives Départementales de l’Orne pendant quatre ans où elle est chargée plus spécifiquement de la communication des archives au public et des archives anciennes. En 2002, Séverine MENET intègre le Pôle Archives de la Région Pays de la Loire où elle assure principalement la mission de collecte des archives auprès des services régionaux et est en charge des relations avec une partie des services versants, ainsi que des actions de communication et de valorisation.
L&Co : Quelles sont les principales missions du Pôle Archives ?
RPL : Les archives régionales sont constituées de l´ensemble des documents produits ou reçus par les services de la Région dans l´exercice de leur activité, et de quelques documents d’origine privée. Les fonds représentent aujourd´hui environ cinq kilomètres linéaires, et ce volume augmente d´environ 400 mètres par an, ou encore 0,01 centimètre pour chaque administré. Comme l´institution, les documents sont assez jeunes, postérieurs pour la plupart à 1982. Toutefois, les plus anciens peuvent remonter plus loin, soit à cause des documents d’origine privée, soit parce que les « ancêtres » de l´administration régionale actuelle – la Mission régionale, l’Etablissement public régional – étaient déjà en exercice dans les années 1960-1970.
Les fonds d´archives régionales sont la clé de l´histoire des régions car on y trouve des sources sur des sujets très étendus : de l´histoire de l´institution régionale à l’histoire locale en passant par la vie politique. Des archives d´origine privée confiées à la Région ont pu venir enrichir les fonds sur d´autres sujets. La nature et le support des documents sont variés : brochures, publications, affiches et objets promotionnels, plans, photographies, maquettes ou cédéroms et les classiques dossiers plus classiques comme ceux des subventions, d´études, des pièces de marchés, des documents financiers, budgets, comptes, et enfin des recueils de décisions, procès-verbaux des délibérations, etc.
Le Pôle Archives a trois missions principales : la collecte, la conservation, l’exploitation et la mise en valeur des fonds. Une équipe polyvalente, composée de 3,5 équivalents-temps plein (quatre archivistes) assure les fonctions suivantes : conseil pour la gestion des documents dans les services administratifs et mise en place de procédures d´archivage conformes à la réglementation des archives publiques ; collecte de fonds d´origine privée en lien avec l´activité de la Région ; traitement et gestion des documents archivés (tri, élimination, classement, rédaction des inventaires) ; maintien de conditions matérielles de conservation satisfaisantes (conditions de température et d´hygrométrie, protection contre les intrusions, contre les sinistres, restauration, choix du support de conservation adapté) ; accueil et aide à la recherche du public interne et externe ; exploitation des fonds à des fins culturelles.
L&Co : Comment est née la démarche de collecte de témoignages oraux ?
RPL : L’élément déclencheur, en 2003, fut un échange avec un fonctionnaire sur le point de partir à la retraite. Il se posait des questions sur les archives à transmettre. Présent dès les origines de l’administration régionale, avant que la Région ne devienne une collectivité en 1982, il intervenait dans les relations presse et a assisté aux premières réunions des instances délibératives. A alors émergé l’idée que toutes les connaissances de nature « expérientielle » n’étaient pas retranscrites dans les dossiers papiers qui ne restituent pas les points de vue des acteurs, ni les ressentis, les atmosphères, les métiers, les méthodes de travail notamment pour les périodes les plus anciennes pendant lesquelles l’ensemble des dossiers n’avait peut-être pas été collecté car les procédures n’avaient pas encore été mises en place.
Avant de se lancer dans une telle démarche, quelques recherches ont été effectuées auprès d’institutions ayant initié des démarches similaires. Mais il s’est avéré que ces dernières n’ont pas été nombreuses. Cependant des informations ont pu être recueillies à partir d’expériences parmi lesquelles celles menées par les Archives municipales de Chartres, les Archives départementales de Haute-Saône, le Centre Georges Pompidou, l’INRA… Depuis, à proximité du service des Archives régionales, les Archives municipales de Nantes ont initié un projet de « mémoire des quartiers » pour lequel une personne est dédiée à l’accompagnement des projets locaux de mémoire orale.
L&Co : Quels ont été les facteurs favorables au lancement de cette démarche ?
RPL : Le projet a été présenté à hiérarchie notamment pour obtenir l’acquisition de matériel nécessaire à l’enregistrement et au traitement des témoignages oraux. Fort de deux éléments positifs, l’arrivée récente d’une archiviste suite à une création de poste et l’accueil très favorable de la hiérarchie, ce projet autour de la mémoire des agents de la Région Pays de la Loire a réellement séduit. Un autre atout non négligeable réside dans le fait que la Région est une entité territoriale jeune : des fonctionnaires ont pu vivre 30 ans de carrière dans l’institution, témoins de la transformation de cette collectivité territoriale, portant ainsi un regard sur elle de ses origines jusqu’à aujourd’hui. Par ailleurs, les « partants » ne représentant qu’un nombre modeste (6 à 10 par an sur un total de 700 agents pour le siège de la collectivité et ses antennes départementales, les agents des lycées transférés en 2007 à la Région n’ayant pas été intégrés dans le périmètre de la collecte par manque de ressources), cela permet d’assurer la faisabilité du projet dans la limite des moyens du Pôle Archives.
L&Co : Quel est l’objectif principal de la démarche ?
RPL : Il s’agit de créer des sources complémentaires aux dossiers papiers pour pallier les limites de l’écrit et traduire une activité et une organisation en termes de vécu, de point de vue des acteurs, de vie au travail, de perception de l’institution par ses agents tous grades confondus.
La démarche est basée sur le postulat suivant : tous les témoignages se valent et constituent un ensemble représentatif de la collectivité et de son personnel sur le départ en retraite, auprès de qui, sur la base du volontariat, des informations complémentaires peuvent ainsi être recueillies, conservées et mise à disposition. Il est ainsi proposé de constituer un corpus le plus complet possible en sollicitant les témoignages des fonctionnaires partant à la retraite.
L&Co : Quelles sont les modalités de mise en œuvre de la démarche ?
RPL : Tout d’abord, il a fallu établir un partenariat avec la DRH qui à l’ouverture d’un dossier de retraite, informe le Pôle Archives et transmet aux « partants » un document de présentation de la démarche. Il s’agit à la fois de les informer sur le pourquoi et le comment et les rassurer en précisant la nature du contrat qui garantit leurs droits.
« Un témoin c’est un témoignage et le témoignage c’est l’histoire » Malraux.
Le Pôle Archives prend alors contact avec les « partants », quand ils sont encore « dans les murs », afin de faciliter les échanges et profiter de leur proximité encore en contexte de travail. Etant donnée la spécificité de la démarche, il est en effet important d’apporter toutes les précisions nécessaires. Aussi le Pôle Archives répond aux questions qui peuvent surgir et précise les thèmes de l’entretien : le parcours personnel au sein de la Région Pays de la Loire mais aussi avant, les métiers exercés, les méthodes de travail et leurs évolutions, les domaines d’activité traversés, l’institution régionale et les informations de nature personnelle (vie au travail au cours de la carrière, sociabilité, faits marquants…).
L&Co : Comment s’effectue la mise en contact avec les « partants » ?
RPL : Lors de la première prise de contact et en cas de réponse positive de la part du « partant », un premier RDV d’une heure (de visu ou par téléphone le plus souvent) est organisé afin de recueillir un résumé de la carrière et quelques éléments de CV visant à préparer l’entretien. C’est aussi un premier pas pour mettre en confiance et répondre aux éventuelles questions (méthodologie des entretiens, questions de contrat et d’inventaire du témoignage). Puis, un second RDV est fixé pour recueillir le témoignage qui peut avoir lieu après le départ effectif en retraite car il est généralement aisé de retrouver les personnes qui demeurent majoritairement dans l’agglomération nantaise.
L&Co : Comment se déroule l’entretien ?
RPL : Au lancement de la démarche, il a fallu consacrer un temps important à la préparation des entretiens menés exclusivement par une archiviste (aujourd’hui il est de plus en plus court car la méthodologie est rodée). A cette étape, il s’agit de réunir des informations sur le parcours des carrières, d’établir une grille de questions sur les métiers et domaines d’activité, en fonction du degré de connaissance plus ou moins approfondi. Une journée et demie est nécessaire pour la préparation et la mémorisation des éléments d’information. L’entretien en lui-même dure généralement de 2 heures à 2H30 et il est fréquemment nécessaire de le renouveler une fois.
L&Co : Comment s’effectue le traitement du témoignage ?
RPL : Une version brute, sans aucun traitement, de l’enregistrement du témoignage est réalisée. Puis une autre version est montée avec un découpage en plages de 5 à 20 minutes correspondant à différents thèmes pour structurer et décrire l’enregistrement dans une logique chrono-thématique. Une plage correspond à un thème et une liste de sous-thèmes est élaborée par ordre chronologique. Un autre archiviste du Pôle Archives intervient pour la partie technique afin de créer les exemplaires pour les enregistrements et d’effectuer un traitement du son lorsque cela est nécessaire (atténuer des ambiances sonores parasites par exemple).
Selon la procédure prévue initialement, le contrat est envoyé au témoin avec l’inventaire et un exemplaire de l’enregistrement sur CD. Cependant, faute de temps, il est difficile de réaliser l’inventaire rapidement, aussi, cette année la procédure changera : il serait préférable de faire signer le contrat après l’entretien sans qu’il y ait d’inventaire réalisé et transmettre les éléments a posteriori. Cela permettra de gagner du temps en régularisant rapidement le statut du témoignage. L’important est que l’autorisation juridique de sa conservation et les informations sur les conditions de consultation souhaitées par le témoin soient assurées. L’expérience a montré que plus le décalage dans le temps est important, plus il est difficile de relancer les personnes passées « hors les murs ». Il est toujours délicat de les relancer pour récupérer le contrat.
Il serait également préférable de produire un descriptif limité du témoignage dans un premier temps et de réaliser ultérieurement une mission spécifique de description par un renfort de ressources humaines sur un ensemble de témoignages ou en recourant à un stagiaire en sociologie par exemple.
L&Co : Quelles sont les modalités de mise à disposition des témoignages ?
RPL : Dans le contrat proposé, trois alternatives sont offertes aux témoins : soit permettre une consultation immédiate en totalité (solution le plus souvent choisie par les témoins) ; soit permettre une communication différée (dans un délai de 5 à 10 ans maximum) de certaines plages (cette possibilité a été proposée pour rassurer les personnes en raison des données sensibles telles que les relations avec la hiérarchie, les difficultés qui peuvent être évoquées…) ; le contrat intègre également des clauses pour l’utilisation publique dans le cadre d’exposition, de diffusion d’extraits sur Internet (les réticences sont là plus fréquentes).
A ce jour, une trentaine d’heures ont été collectées (13 témoignages). D’une manière générale, un accueil très positif est rencontré puisqu’on peut noter que près de la moitié des « partants » sollicités pour un entretien ont répondu positivement depuis 2004. De nombreux contacts sont encore en cours, mais il est difficile de réduire le temps de collecte car une seule archiviste est dédiée à ce projet qui vient se rajouter aux missions obligatoires du Pôle Archives.
L&Co : Comment avez-vous communiqué sur le projet ?
« Votre témoignage »
RPL : Le Pôle Archives dispose d’une page sur l’intranet de la Région Pays de la Loire où est présenté un ensemble d’informations sur la politique et les techniques d’archivage, quelques documents utiles dont un guide intitulé « Paroles d’agents régionaux ». Une rubrique intitulée, « Votre témoignage », est représentée par un magnétophone dont les sons symbolisés par des bulles représentent les logos successifs de l’institution. Par ailleurs, dans le cadre de la formation et de la sensibilisation effectuées par le Pôle Archives à destination des agents des différents services (accueil des nouveaux, ateliers d’archivages…), nous présentons systématiquement la démarche de collecte de témoignages oraux.
Partage d’expertise avec le service du patrimoine
Depuis 2007, la Région est compétente en matière d’inventaire de son patrimoine culturel et le Pôle Archives partage sa salle de lecture avec le Fonds de l’inventaire du patrimoine régional qui, en raison de l’intérêt croissant pour le patrimoine immatériel, pratique également la collecte de témoignages. Ainsi par exemple, dans le cadre du projet de réouverture de la ligne ferroviaire entre Nantes et Chateaubriant fermée il y a 30 ans, une collecte de témoignages filmés a été réalisée par le service du patrimoine. Des échanges entre ces services ont porté sur la notion de patrimoine immatériel et les réflexions associées sur les questions de stockage des informations collectées. Le Pôle Archives a ainsi partagé par exemple son expertise en matière d’archivage électronique.
Insertion dans un réseau départemental de collecteurs
Le Pôle Archives participe, sous forme de rencontres et de formations, à un réseau de services d’archives effectuant de la collecte d’archives orales tels que les Archives départementales du Maine-et-Loire qui entretiennent un réseau de collecteurs dans le département.
Conseil pour le développement d’initiatives similaires
D’une manière générale, le Pôle Archives a développé une expertise lui permettant de faire du conseil auprès d’autres porteurs d’initiatives similaires comme par exemple, un autre service d’archives régionales qui est actuellement en pleine réflexion sur le lancement d’une collecte de témoignages oraux. Il a ainsi échangé des documents et prodigué des conseils concernant l’approche des témoins pour éviter certains écueils.
L&Co : Quelles formes la valorisation des témoignages collectés pourrait-elle prendre ?
RPL : Les actions de valorisation, même modestes, sont très importantes car elles contribuent à améliorer la visibilité du travail du Pôle Archives en interne et appuyer sa démarche. Une tentative de publication dans le magazine interne de la collectivité ou sur l’Intranet a été faite pour publiciser la démarche mais la proposition d’article n’a pas encore abouti (la publication d’un sujet ne concernant pas tous les agents de la collectivité étant plus difficile).
Une première forme de valorisation de la collecte de témoignages va être réalisée très prochainement dans le cadre d’un projet de développement de l’accueil de publics scolaires : un atelier pédagogique sur les transports ferroviaires va être proposé, au cours duquel un extrait du témoignage d’un fonctionnaire ayant travaillé dans ce domaine sera diffusé.
D’une manière plus ambitieuse, il est utile d’avoir un corpus suffisamment consistant pour le faire connaître auprès des chercheurs. Une piste de réflexion pourrait être amorcée avec un laboratoire de sociologie à Nantes.
L&Co : Quels enseignements avez-vous pu tirer de la collecte de témoignages oraux ?
Contribution à un enrichissement pour l’ensemble des activités de l’archiviste
RPL : C’est une occasion de mieux faire connaître et d’une autre manière, en interne, le travail de l’archiviste. Cela permet d’améliorer la connaissance des domaines d’activité, des méthodes de travail et de certains enjeux au sein de la Région Pays de la Loire, d’acquérir plus de profondeur historique sur leur évolution. Cela permet également d’envisager différemment la sélection des documents dans le classement. Comme il n’existe pas beaucoup de littérature sur cette jeune institution, il est donc important de capitaliser les connaissances collectées directement auprès de ses acteurs.
Focalisation sur la nature scientifique de la démarche
Lors de la prise de contact avec les « partants », il est indispensable d’être très clair sur l’objectif de la démarche présenté avant-tout comme scientifique. Du fait des questionnements qui ont pu surgir ou d’éventuelles ambiguïtés soulevées, il faut insister sur le fait que cette collecte de témoignages ne sert pas une forme de communication interne, mais la constitution de sources pour un public extérieur au même titre que des dossiers papiers. On demande aux témoins de bien prendre conscience des enjeux de ce travail donnant lieu à un inventaire et un descriptif de l’enregistrement qui sera disponible en salle de lecture et sur Internet (de façon éventuellement anonymisée dans ce dernier cas).
Importance de l’ajustement du partenariat avec la DRH
Depuis 2004, quelques aléas ont été rencontrés, notamment lors de la phase de démarrage avec le partenariat de la DRH qui n’a pas systématiquement prévenu de l’ouverture des dossiers de retraite. Certains « partants » sont ainsi passés entre les mailles du filet.
L&Co : Quelles bonnes pratiques en retenez-vous ?
Transparence de la démarche
RPL : Il faut être le plus transparent possible sur la démarche pour faciliter la sensibilisation ultérieure et rassurer les témoins en précisant que leurs témoignages ne seront pas utilisés à des fins de communication interne ou pour des usages ne correspondant pas à l’objectif scientifique.
Accompagner la présentation du contrat au témoin
Un important et essentiel travail d’accompagnement dans la présentation du contrat contribue à ce que les témoins ne choisissent pas le délai de 10 ans pour la mise en consultation du témoignage. A l’occasion de ces échanges, l’avis de l’archiviste est sollicité pour répondre aux questionnements, notamment sur la manière de formuler les choses pour ne pas mettre en difficultés certaines personnes. Il s’agit également de trouver les arguments convaincants pour encourager notamment les témoins qui n’ont pas occupé de poste à un niveau hiérarchique élevé. En se focalisant sur tous les métiers, à quelque niveau que ce soit (ex : une personne chargée de l’accueil du public relate des choses très intéressantes en matière de relations avec les citoyens), cela peut aider les témoins à libérer dans un exercice particulier exigeant de se livrer, d’évoquer des choses personnelles qui seront conservées pour la postérité.
Etre en écoute complète
Etre le moins directif possible afin de s’assurer d’une plus grande richesse de propos recueillis. Poser des questions suffisamment ouvertes. Malgré la préparation, le danger demeure de trop intervenir. Le but du jeu c’est que le témoin parle le plus possible et que l’interviewer relance la machine et rebondisse sur de nouveaux sujets, sans faire de commentaires sur les propos.
L&Co : Quelles sont les principales limites rencontrées ?
La « cerise sur le gâteau »
RPL : Ce type de collecte ne faisant pas partie des missions obligatoires du Pôle Archives, il faut rappeler à la hiérarchie son utilité et sa complémentarité avec la recherche d’autres sources d’archives, afin également de justifier le temps passé à la collecte et au traitement des témoignages oraux.
Tracer des lignes
L’objectif d’une telle collecte n’est pas à renier, mais il est difficile dans le cadre d’un témoignage de plusieurs heures de tout aborder de la même manière. Il est très variable selon les témoins, même si une certaine homogénéité sociologique dans le personnel de la Région Pays de la Loire peut être relevée. La façon de présenter les activités, leur niveau de profondeur et les anecdotes relatées diffèrent d’un témoin à un autre. Il est difficile de faire tenir 30 ans de carrière dans un enregistrement. La limite réside ici dans un niveau de détail très important que l’on ne peut pas atteindre. Cela rejoint la notion de source constituée à un moment donné d’une certaine façon et qui doit être critiquée par les chercheurs : faire entrer en résonnance avec d’autres sources orales et écrites. La préparation des entretiens permet de tracer des lignes favorisant le surgissement de souvenirs : ce qui fait toute la richesse de l’entretien.
Un enrichissement du corpus plutôt lent
Au lancement de la démarche, une répartition avait été prévue par archiviste, en fonction des différents domaines d’activité déjà répartis pour le travail de collecte général mais en raison du manque de disponibilité, cela n’a pas été possible de s’y tenir. Aussi une seule archiviste mène les entretiens et un autre l’assiste dans le traitement des enregistrements.
L&Co : Quelles sont les perspectives de cette démarche ?
RPL : Aujourd’hui la pérennité de la démarche est assurée par la publication en ligne de l’inventaire et par une méthodologie à présent assise. A l’avenir, il faudra réajuster le traitement en étant plus modestes pour faciliter le suivi et la poursuite régulière de la collecte : être moins ambitieux sur le traitement immédiat pour faire signer les contrats, en étant au clair juridiquement sur les témoignages et trouver des façons de valoriser et de faire connaître le corpus auprès des universitaires. Enfin, si des moyens supplémentaires peuvent être dégagés, l’élargissement du périmètre de la collecte pourrait être envisagé en effectuant des collectes thématiques auprès de fonctionnaires ayant intégré la collectivité suite à un transfert de compétences, afin de recueillir des informations sur la manière dont la décentralisation a été vécue.