Interview concernant le nouveau site des Archives départementales : http://archives.rhone.fr , Laetitia OLIVIER, responsable de l’action culturelle et de la communication des Archives départementales du Rhône.
L&Co : Le nouveau site des Archives départementales du Rhône est sorti il y a trois semaines. Pouvez-vous vous présenter pour savoir quel est votre rôle au sein des Archives et plus particulièrement sur ce projet ?
Laetitia Olivier : Je suis responsable de l’action culturelle et de la communication aux Archives départementales du Rhône. Mon rôle dans la création de ce site était un rôle de coordination : celui de chargée de projet. Un autre chargé de projet était plutôt sur la partie archives et données et moi-même supervisait les questions de conception, navigation, d’interface, etc.
L’idée de la direction des Archives était de placer d’emblée ce projet du côté de la communication, d’en faire un site ouvert, grand public et justement pas trop archivistique. Cette orientation s’est traduite par le fait de confier cela au responsable de la communication et de l’action culturelle, même si la collaboration s’est faite avec l’ensemble de l’équipe des archivistes.
L&Co : Quelle est votre formation initiale ?
Laetitia Olivier : J’ai une formation en histoire de l’art et en muséologie. Je ne suis ni archiviste, ni webmestre.
« Ce site a été le prétexte à la création de nouveaux outils de recherche »
L&Co : Comment le projet a-t-il pu voir le jour ?
Laetitia Olivier : C’est un long projet. Cela fait longtemps que les Archives du Rhône portent ce projet, mais il fut long à mettre en œuvre car plusieurs partenaires étaient concernés : les directions des Archives, de la Communication et des Services Informatiques. Il y a eu quelques discussions pour savoir qui porterait le projet. Cela fait deux ans que le projet a été réactivé avec la rédaction du cahier des charges. Le travail avec le prestataire a débuté en septembre dernier.
La création de ce site a été un prétexte à la création de nouveaux outils de recherche, en utilisant toutes les potentialités du site (la recherche thématique, etc.).
La mise en ligne officielle s’est faite en mai 2011.
Nous avons travaillé en très étroite collaboration avec la cellule multimédia de la Direction de la Communication. C’était très intéressant de travailler avec quelqu’un d’ouvert sur les technologies du Web, le Web 2.0. Le projet a vraiment gagné avec cette collaboration. Les maquettes du site ont ainsi pu être réalisées en interne, de même que la navigation.
L&Co : Comment le projet a-t-il été géré en interne ?
Laetitia Olivier : Les Archives départementales ont nommés deux chargés de projet. Le premier avait un profil d’archiviste, il s’est notamment occupé de la structuration des données et du travail de création de nouveaux outils de recherche avec le soutien d’une dizaine d’autres collègues. Le site a mobilisé de nombreuses personnes en interne : cela a contribué à faire collaborer tout le monde, à les rendre acteurs de ce projet. Il a été le prétexte à des travaux archivistiques (comme la saisie des bordereaux de versement par exemple). Le chantier engagé fut ambitieux : rebalayer tous les fonds avec la perspective d’une recherche thématique. L’arborescence thématique, on a dû y passer un an. Même si, sur le coup, cela était perçu comme une surcharge de travail, une fois l’outil en ligne et les premiers retours positifs des lecteurs, tout le monde a vu l’utilité de ces efforts.
L&Co : Pourriez-vous nous présenter brièvement les contenus du site ?
Laetitia Olivier : Nous concevions davantage ce site comme un portail de recherche, plus qu’un site institutionnel des Archives du Rhône. L’idée a été de substituer le site à un accueil en salle de lecture. Les gens viendraient sur le site avec une idée de ce qu’ils ont à chercher, plutôt que pour savoir ce que sont les archives et où nous sommes.
Nous avons mis les fonds au premier plan, avec un accès privilégié aux fonds numérisés. Une véritable salle de lecture virtuelle. Deux niveaux de recherche sont proposés aux internautes : dans la partie haute, une recherche un peu experte, pour les personnes qui savent ce qu’elles veulent trouver et, dans la partie du dessous, une interface de recherche davantage guidée, comme lorsque l’on oriente un lecteur en salle de lecture. Quatre entrées thématiques ont été sélectionnées : une personne / un lieu / une période / un thème.
Pour la recherche par période, par exemple, en salle de lecture nous amenons les lecteurs à reformuler et restreindre leur champ de recherche au maximum (ex : un lecteur qui arrive et dit qu’il veut travailler sur le Moyen-Age). Dans cette salle de lecture virtuelle, nous avons eu recours à une frise chronologique pour obliger le lecteur à restreindre son champ de recherche chronologique de la même manière.
Il y a deux ans, nous avons fait le test durant quelques semaines de noter toutes les questions que les lecteurs posaient en venant aux Archives. Cela nous a permis de tester nos interfaces et de voir si la page d’accueil pouvait permettre de s’orienter, s’ils pouvaient y trouver des réponses dans les contenus des rubriques. Cela s’est avéré très utile.
Nous retrouvons enfin en bas de page les informations pratiques sur le service, mais vous le voyez, ce n’est pas ce qui prime sur ce site.
L&Co : Aujourd’hui, quelles en sont les perspectives de développement et d’enrichissement ?
Laetitia Olivier : Nous allons continuer à mettre en ligne des compléments numérisés : un fonds de cartes postales anciennes, un complément pour l’état civil également dès l’automne. Nous projetons également de mettre en ligne de nouvelles rubriques d’aide à la recherche.
Nous avons effectué quelques mises à jour depuis le lancement grâce aux retours des internautes qui utilisent le bouton « signaler un dysfonctionnement ».
Un autre projet important est de rendre accessible en ligne, cet automne toujours, la bibliothèque des archives.
A plus long terme, nous aurions envie d’aller plus loin sur la gestion des paniers, les options de partage ainsi que la structuration des données dans ce dernier, en faire un espace de travail en ligne.
L&Co : Avez-vous prévu d’intégrer un module de commande en ligne ?
Laetitia Olivier : Non, pas pour l’heure, car ce n’est pas le même logiciel qui gère les communications et celui qui gère cette application Web. Nos données sont actuellement en double, dans les deux applications.
L&Co : Les données ont-elles été facilement exportées d’une application à l’autre ?
Laetitia Olivier : Nous partions dans l’idée que les données allaient être strictement les mêmes dans l’une et l’autre applications. Mais certains fonds, comme l’état-civil par exemple, étaient trop lourds pour être intégrés dans l’outil de gestion. Je pense que l’écart ne peut que se creuser entre les applications logicielles. L’export a permis un important travail de nettoyage des données. En salle de lecture, actuellement, les lecteurs consultent le site Internet et non plus l’application de gestion.
Nous réfléchissons différemment à la façon de structurer les données pour améliorer l’affichage et le rendu. Quand on est sur un travail d’archive, on structure les données d’une certaine manière mais cela peut donner quelque chose de différent à l’affichage. Certaines informations intéressantes pouvaient ne pas sortir en affichage car elles étaient placées à un autre niveau.
De plus en plus il va y avoir du dialogue, entre applications bien sûr, mais aussi au niveau des pratiques. Notre travail sera davantage orienté vers l’extérieur.
L&Co : Est-ce que de nouveaux métiers sont en train d’émerger ?
Laetitia Olivier : Oui, assurément. L’archiviste va devenir de plus en plus informaticien. Mais dans mon poste, j’ai l’impression de développer une nouvelle façon de communiquer plutôt que de développer un nouveau métier. On communique à davantage de personnes, on s’inscrit sur de nouveaux médias comme Twitter, l’archiviste communique différemment.
« Ce sera intéressant ensuite d’échanger sur les pratiques »
L&Co : Avez-vous défini une stratégie digitale ?
Laetitia Olivier : Ça a été réfléchi avant la mise en ligne. Mais là encore, cela a été le reflet d’une collaboration avec la cellule multimédia de la Direction de la Communication. Ils nous ont sensibilisé très largement là-dessus. On a choisi Twitter plutôt que Facebook et un réel choix a été opéré. L’idée n’est pas de faire un coup de pub, que ça ne retombe pas comme un soufflé. Cela a été réfléchi.
Pour Twitter, il s’agit davantage d’un média pour informer, donner de l’information. Nous pouvons davantage interagir avec les autres, prendre la place que l’on veut. Sur Facebook, on est plus dans un dialogue.
Ces choix dépendent d’une politique de l’institution mais aussi de l’implication de personnes en poste à un moment T, avec leurs sensibilités. Ce sont aussi des habitudes personnelles qui font que l’on va davantage pencher pour un média ou un autre. C’est bien qu’il y ait un élan en ce moment, cela montre qu’il y a un décloisonnement, un changement d’image, qui est en train de s’opérer dans les archives, je n’y vois pas de concurrence. C’est intéressant que les services se positionnent. Ce sera intéressant ensuite d’échanger sur les pratiques. Chacun teste et essaye de se positionner pour voir quelle est la bonne façon de communiquer.
L&Co : Est-ce que le Conseil général s’implique dans cette stratégie ?
Laetitia Olivier : Nous sommes assez libres de nos choix, mais cela s’est fait en dialogue avec la cellule multimédia. Le Rhône a un compte Twitter, certains services culturels du Conseil général aussi.
L&Co : Comment avez-vous conçu votre teaser, la vidéo de lancement de votre site ?
Laetitia Olivier : C’est vraiment une impulsion de la cellule multimédia. Nous, nous sommes très ouverts aux nouveautés, à faire bouger les choses et changer l’image des archives. Erwan Le Luron, responsable du projet au sein de cette cellule a réellement tout compris de ce que l’on fait aux archives et de l’intérêt pour nous de communiquer de cette sorte. Cette vidéo a été réalisée en interne.
L&Co : Quelles vont être vos missions futures vu que ce projet est fini ?
Laetitia Olivier : Nous restructurons différemment les rôles par rapport au site Web. Je vais me dégager de la partie données, arborescence thématique, pour rentrer davantage dans le rédactionnel. Je m’occupe également des expositions. Tout le travail de conception et de recherches fait pour les expositions pourra trouver une déclinaison sur le site Web.
L&Co : Le déménagement approche. Le développement de votre site Web a-t-elle une incidence sur la conception du futur aménagement dans le bâtiment ?
Laetitia Olivier : Nous sommes actuellement sur deux sites. Le travail sur les instruments de recherche a permis de décloisonner les deux sites et de travailler davantage ensemble. Ce site est un outil plus ergonomique et plus simple, qui permet pour tous de mieux appréhender les fonds dans le bâtiment. Dans notre future salle de lecture, il y a aura un porte informatique par place pour faciliter l’accès aux fonds numérisés, aux sites Web, etc.
L&Co : Quel bilan faites-vous de ce premier mois après le lancement ?
Laetitia Olivier : Nous sommes très satisfaits. D’après les statistiques de consultation, les gens passent du temps sur le site, qui est utilisé comme un site de recherche. Cela nous conforte par rapport à ce que nous voulions faire de ce site. Le taux de remontées est assez faible : les internautes trouvent ce qu’ils veulent.
La fréquentation de la salle de lecture n’a pas baissé récemment. Au contraire, des personnes venaient pour la première fois car elles avaient vu le site Web. Dans de nombreux départements, on constate une baisse de la fréquentation après la mise en ligne d’un tel site Web. Mais l’idée était de mettre à disposition de nombreux instruments de recherche, un nombre important de données en ligne (pour l’heure, près de 1500 fichiers PDF). Cela permet aussi de mieux savoir ce que nous conservons et de venir sur place pour consulter des documents découverts via le site.
Retrouvez prochainement l’entretien de M. Erwan Le Luron chargé de projet du Conseil Général du Rhône responsable du développement du site des AD du Rhône.